Les trois premiers mois avec les enfants : le chemin vers l’autonomie
Fin novembre 2022, l’établissement de Lyon 8ᵉ a accueilli une nouvelle promotion. Les enfants ont entre 6 et 7 ans. Il est important pour le bon déroulement de l’accompagnement et la mise en confiance de l’enfant de travailler en priorité dès son arrivée, l’assimilation des règles, la cohésion et l’autonomie.
Assimilation des règles
Durant le premier mois, nous avons mis l’accent sur l’assimilation des règles. Les enfants ont créé leur contrat d’engagement. Nous nous sommes basés sur de l’éducation positive[1]. Sous forme de jeux ludiques, les enfants nous transmettaient ce qu’ils pouvaient faire sur le chemin de l’école, dans les couloirs, dans l’établissement. En découlent forcément les pratiques à ne pas avoir. Nous avons ensuite imprimé le contrat que les enfants, les parents ainsi que le référent éducatif devaient signer. De cette façon, le contrat implique tous les acteurs de Ma Chance Moi Aussi dans le projet. L’un des piliers de Ma Chance Moi Aussi est la co-éducation et il nous semble primordial d’impliquer les parents dans l’ensemble des actions que nous réalisons.
La cohésion
Le principe de cohésion a été travaillé en parallèle de l’assimilation des règles. Nous avons intégré dans nos pratiques et discours des valeurs de non-jugement, de prise d’initiative et d’entraide. Nous nous sommes appuyés sur des jeux de société et des jeux sportifs pour créer un esprit d’équipe dans le groupe. Notre pédagogie est basée sur l’éducation populaire[2]. Nous avons beaucoup insisté sur le fait que chaque personne apporte son savoir au groupe ; qu’un jour un enfant peut aider un autre sur une problématique, mais que demain les rôles peuvent s’inverser.
« Nous sommes une équipe, on s’aide » Ben Ali
Mais pourquoi toutes ces notions en amont pour travailler l’autonomie ?
Nous avons la chance de pouvoir accompagner des enfants sur plusieurs années. Il est donc préférable de préparer au mieux la transmission d’autonomie aux enfants. Il est nécessaire que l’enfant grandisse dans un environnement stable et rassurant. Le respect des règles nous permet de donner de l’autonomie ritualisée[3] à l’enfant dans un cadre sécuritaire (connaître les limites, ne pas se mettre en danger, entretenir le lien de confiance avec les autres).
Une autre forme d’autonomie passe par la prise d’initiative et la prise de décision. Les valeurs de cohésion incitent l’enfant à prendre des initiatives. L’enfant sait qu’il peut se tromper sans que le reste du groupe se moque de lui ou le juge. Enfant comme adulte, nous apprenons dans l’échec. L’enfant doit apprendre à se tromper. Nous adoptons une méthodologie participative[4] qui est d’imposer certaines règles qui ne sont pas négociables (sécurité) mais laisser de la place aux enfants pour prendre leurs propres décisions et d’en parler librement avec les autres.
Concrètement, notre constat sur l’évolution de l’autonomie
Avec le recul de 6 mois que nous avons actuellement depuis l’arrivée du nouveau groupe, nous pouvons dire qu’il y a une nette évolution de l’autonomie ritualisée. Cela est dû en partie à deux facteurs : tout d’abord l’enfant est timide et peu confiant à son arrivée. Le temps l’aide à prendre ses marques, mais aussi et surtout le travail fourni par les enfants durant les projets (assimilation des règles, cohésion), la répétition et la rigueur entretiennent le bon fonctionnement de cette autonomie.
Aujourd’hui, les enfants ont acquis des automatismes tels que :
• Ils savent que pour le bien-être du voisinage, ils montent en silence dans l’établissement.
• Pour des questions d’hygiène, ils se lavent les mains lorsqu’ils arrivent dans l’établissement.
• Quand le travail est fini, ils peuvent prendre un jeu dans le calme pour ne pas déranger les autres.
Bien entendu, nous avons expliqué aux enfants l’importance de ces règles. L’enfant sait ce qu’il doit faire, nous le laissons en autonomie effectuer ces tâches du quotidien.
Le dernier point qui nous semble le plus important et sur quoi nous insistons davantage avec les enfants, concerne l’autonomie par la prise d’initiative. Au départ, il y a eu peu, voir aucune prise d’initiative des enfants. Plus les mois passent, plus les enfants essayent par eux-mêmes. Par exemple, lorsque nous montrons aux enfants comment jouer à un jeu de société, il arrive qu’un ou plusieurs enfants essaient avec une autre technique et y arrivent. C’est très bien. Nous essayons que l’enfant soit le moins dépendant de l’adulte.
Nous leur avons transmis un socle de base pour leur autonomie. Maintenant, petit à petit, c’est aux enfants d’essayer et de voir ce qu’il se passe.
Rien n’est acquis, nous travaillons au quotidien pour les accompagner. Nous régulons les projets, les activités, notre discours en fonction de l’avancée et des problématiques du groupe.
La prise d’initiative permet par moment d’arriver à ce genre de situation !
[1] Éducation positive : Parler des droits de l’enfant (ce qu’il peut faire). Cela permet une réflexion plus poussée des enfants. Facilite la mise en place d’un cadre tout en étant dans la bienveillance. Mise en place d’un lien de confiance primordial pour notre accompagnement
[2] Éducation populaire : C’est la transmission de valeurs et de connaissances par le peuple pour le peuple. C’est un complément de l’Education nationale. L’expérience et le savoir de chaque individu sont bons à prendre.
[3] Autonomie ritualisée : Ce sont des actions du quotidien que les enfants ont intégrées par mimétisme et répétitions. L’enfant effectue machinalement les bons gestes à adopter (exemple : Mes lacets sont défaits, je refais mes lacets). C’est l’autonomie de base qui ne laisse pas place à la prise d’initiative de l’enfant. Elle est indispensable pour l’évolution vers l’âge adulte.
[4] Méthodologie participative : Cette méthode de travail consiste à prendre l’avis des enfants en compte. Chacun peut donner son avis sur la situation vécus ou sur une décision à prendre. Elle permet d’intégrer l’enfant et de lui donner de l’importance dans le fonctionnement de l’établissement.